Un an après la libération de Kobané

Avertissement : les tribunes sont des contributions individuelles de sympathisants du mouvement au débat et ne reflètent pas nécessairement les positions de celui-ci.

, par Jean-Francis Billion, Jean-Luc Prevel

Un an après la libération de Kobané

À propos d’une réunion-débat à Lyon : « Un an après la libération de Kobané », et d’une rencontre avec Mme. Marie-Christine VERGIAT, Présidente du groupe d’amitié kurde du Parlement européen.

Cette réunion, « Un an après la libération de Kobané – Comment soutenir le peuple kurde dans la défense de ses droits et dans la construction du confédéralisme démocratique ? » était organisée par l’association Amitiés Kurdes de Lyon et Rhône-Alpes, fondée en février 2015 à l’initiative de la CIMADE et présidée par Thierry Lamberthod, également membre de l’UEF Rhône-Alpes. Elle a réuni environ 70 personnes à la Mairie du 1er arrondissement de Lyon vendredi 29 septembre, dont la Maire d’arrondissement qui s’est exprimée dans le débat et divers représentants de partis politiques kurdes dans la diaspora lyonnaise, proches du PKK ou d’un parti d’essence libérale.

Trois autres militants fédéralistes lyonnais, Jean-Francis Billion, Hocine Hamidouche et Jean-Luc Prevel y ont également participé afin de mieux appréhender la réalité multiple et complexe du peuple kurde considéré comme le plus grand « peuple sans État » du monde, actuellement éclaté (depuis les traités internationaux ayant clôturé la première guerre mondiale) entre de nombreux États du Proche-Orient (sans compter une importante diaspora dans l’Union européenne et ailleurs) mais principalement entre quatre d’entre-eux : la Turquie, l’Irak, la Syrie et l’Iran représentant dans certains cas jusqu’à 20 % ou plus de leur population. Pour illustrer la complexité de ce peuple, souvent martyr même lorsqu’il a parfois participé à des génocides visant d’autres nationalités comme les Arméniens ou les Assyro-chaldéens, signalons aussi que la langue kurde elle-même est multiple se divisant en plusieurs variantes, ou que la population kurde se partage entre de nombreuses religions. Mais ce n’est pas là, au-delà de ces brèves précisions, l’objet de notre texte.

La réunion a commencé avec un rappel, par Mme. Pierrette Meynier, de l’histoire et de l’action de la CIMADE, d’origine protestante et fondée en 1939 à Bièvres (Comité inter-mouvements auprès des évacués), et de son combat actuel pour le maintien de l’ouverture des frontières de l’Union européenne aux réfugiés en provenance du Moyen-Orient et en particulier de Syrie et d’Irak. A sa suite une journaliste et une photographe ayant passé quelques jours à Kobané juste après sa libération par les Kurdes du joug de Daesh ont présenté avec un montage diapo leur témoignage avant de donner lecture de courts extraits d’une brochure du leader kurde Abdullah Ökalan, actuellement emprisonné en Turquie depuis 1999, Confédéralisme démocratique. Ces deux mots résument en effet la nouvelle ligne politique du principal parti politique kurde de Turquie, le PKK fondé en 1978, depuis qu’il a renoncé au séparatisme et à la lutte armée, transformant ses forces armées en milices d’autodéfense. Ces extraits se rapportaient à deux thèmes : la stricte égalité entre les genres à tous les niveaux de décision de la société, du parti et des associations qui en dépendent, et le rôle et la représentation des diverses communautés nationales et culturelles au sein de la société et de ses divers organes. Le tout sur la base de l’expérience actuellement en cours dans les cantons kurdes de Syrie, dont l’ensemble porte le nom de Rojava (l’ouest en kurde) de facto indépendant de la Syrie depuis novembre 2013 (informations glanées rapidement sur Wikipedia).

Qu’est-ce que le « confédéralisme démocratique ». La place nous manque ici pour définir cette formule mais notons qu’elle se rapproche par certains aspects du fédéralisme européen et même mondial, mais aussi du fédéralisme « intégral » professé par Alexandre Marc, même s’il semble douteux que ce dernier figure parmi les sources d’Ökalan et de ses amis, celles-ci semblant plutôt être recherchées du côté de certains penseurs marxistes dissidents, libertaires ou anarchistes. N’empêche que les critiques de l’État-nation et même de l’inefficacité des Nations unies qui en sont en fin de compte la somme, ne peuvent que nous intéresser et demander une analyse plus fouillée de notre part. Nous ne sommes pas loin de penser avant de l’avoir entamée ou d’y avoir contribué que le « confédéralisme démocratique » pourrait avoir beaucoup à apporter à une réflexion fédéraliste sérieuse sur l’avenir du Moyen-Orient tout entier et en particulier sur la résolution du conflit israélo-palestinien. La résolution des problèmes actuels de cette région du monde ne peut laisser les fédéralistes et les Européens indifférents à l’heure en particulier des problèmes migratoires que nous connaissons. Nous reprenons ici pour illustrer notre propos un bref extrait de la brochure (en ligne) d’Ökalan Confédéralisme démocratique. « Le droit à l’autodétermination des peuples comprend le droit à un État propre. La fondation d’un État ne permet cependant pas d’augmenter la liberté d’un peuple, et le système des Nations unies, fondé sur les États-nations, a démontré son inefficacité. Les États-nations se sont ainsi mis à représenter de sérieux obstacles face aux évolutions sociales. Le confédéralisme-démocratique est le paradigme inverse, celui des peuples opprimés. Le confédéralisme-démocratique est un paradigme social et non pas étatique. Il n’est pas contrôlé par un État (central), il représente les aspects organisationnels et culturels d’une nation démocratique. Le confédéralisme-démocratique est fondé sur la participation de la population, et ce sont les communautés concernées qui y maîtrisent le processus décisionnel. Les niveaux les plus élevés ne sont présents qu’afin d’assurer la coordination et la mise en oeuvre de la volonté des communautés qui envoient leurs délégués aux assemblées générales » (cf. l’article « Pourquoi un confédéralisme-démocratique », publié par Eden Dersim sur le site Réseau d’informations libres de la Mésopotamie le 3 septembre 2014).

La dernière partie de la conférence a été l’intervention de Madame Marie-Christine Vergiat, parlementaire européenne de la Gauche unie européenne qui a apporté un témoignage précieux sur le travail effectué au Parlement européen par des élus de divers groupes politiques mais la difficulté à obtenir une motion écrite satisfaisante à cause du lobbying fait en sens opposé par des élus proches des thèses de la Turquie. Madame Vergiat s’est également insurgée que, de nombreuses années après l’abandon de la lutte armée et de la revendication indépendantiste au profit d’une simple demande d’autonomie interne et de reconnaissance de droits en matière linguistique et culturelle au sein d’une Turquie démocratique, le PKK soit toujours considéré par les États-Unis et à leur suite par l’Union européenne comme une organisation terroriste. Elle s’est également insurgée contre la répression policière envers les milieux et les élus kurdes tout en notant que la France en ce moment précis suivait elle-même une pente savonneuse en matière de respect des droits de la personne avec en particulier le maintien de l’État d’urgence et la déchéance de la nationalité… tout en dénonçant, toujours à raison, le rôle sinistre et trouble de la Turquie vis-à-vis de l’État islamique et du terrorisme.

À l’issue de la réunion il a été possible à l’un d’entre nous de poursuivre la discussion avec Mme. Vergiat, en présence de Thierry Lamberthod, sur le chemin de la gare de La Part-Dieu, au cours de laquelle ont été abordés tout autant son amitié avec sa collègue Barbara Spinelli au Parlement européen, le dernier congrès des Jeunes Européens France à Marseille auquel elle a été très heureuse d’avoir participé, sa sympathie pour… Chloé Fabre et Jérôme Quéré, son successeur à la présidence des JE, et enfin de l’inviter à participer le 15 mars à la réunion au Parlement européen en faveur de la Pétition New Deal 4 Europe.

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