Élections européennes : « Je ne sais pas encore pour qui voter et voici pourquoi »

Avertissement : les tribunes sont des contributions individuelles de sympathisants du mouvement au débat et ne reflètent pas nécessairement les positions de celui-ci.

, par Pierre Jouvenat

Élections européennes : « Je ne sais pas encore pour qui voter et voici pourquoi »

Parlement européen - David Iliff - CC-BY-SA

L’UEF étant un mouvement transpartisan, plusieurs de nos militants ont choisis de s’engager en faveur de telle ou telle liste parmi celles compatibles avec les propositions des fédéralistes. Nous leur avons proposé de publier une série de tribunes pour qu’ils expliquent leurs choix.

Pour être bien compris, je dois d’abord me présenter. Au terme d’une carrière internationale, je débarque en 2001 en Haute-Savoie depuis ma Suisse natale et fédérale, où je votais à gauche ou écolo et où j’avais milité pour l’adhésion de la Suisse à l’UE. Rapidement pris en charge socialement par la classe politique dominante de mon coin, et frappé par certains excès de la gauche française, j’ai mes premières hésitations gauche/droite et je vote Nicolas Sarkozy lorsque j’acquiers la nationalité française en 2007.

Confronté pour la première fois aux élections européennes en 2009, je découvre le problème du débat centré sur la politique nationale, que déjà j’attribue à l’absence de partis transnationaux, un problème inexistant en Suisse où les partis sont transcantonaux. Je vote alors EELV qui me paraît être le seul parti portant un vrai discours européen. Je ne m’émeus cependant pas trop et poursuit ma petite vie paisible consacrée à la nature, la photographie et mon chien. Mais rebelote en 2014. L’UMP invite à voter sa liste « pour dire non à la politique de François Hollande qui ruine les Français ». Un candidat que j’interroge sur la différence entre les projets UMP et UDI/MoDem m’explique que ce dernier rejoindra le groupe ALDE, en faveur de davantage d’intégration, alors que l’UMP rejoindra le PPE, plus souverainiste. Je découvre cette fois-ci les vrais enjeux de l’élection et l’importance des groupes au PE, et vote UDI/MoDem. Mais c’en était trop. Je ne voulais plus voir ça en 2019. Je sors alors de ma torpeur pour m’engager dans une action militante liée à la réforme de la loi électorale. J’avance des propositions dont je ne ferai pas état ici car ce n’est pas le propos.

Aujourd’hui parfaitement informé, mon choix pour le 26 mai prochain s’avère difficile.

J’avais déjà pris mes distances avec mes amis LR lors de la présidentielle de 2017 et les ai définitivement envoyés au diable après l’élection de Laurent Wauquiez à la présidence du parti. Discours trop identitaire et nationaliste pour le citoyen européen que je suis et pour le Suisse plongé dans la marmite fédéraliste dès sa naissance. Je suis moins critique vis-à-vis du PPE qui a compté dans ses rangs plusieurs pro-européens, voire des fédéralistes, dont le regretté Alain Lamassoure, mais cependant la timidité de ce groupe face aux réformes urgentes m’incite à aller voir ailleurs.

Séduit comme beaucoup par le discours pro-européen d’Emmanuel Macron, je l’avais activement soutenu en 2017 et je devrais donc logiquement voter la liste Renaissance. Mais deux choses me gênent. Premièrement, LaREM c’est la macronie et notre cher président, pro-européen dans ses discours, se révèle ambigu et semble vouloir privilégier l’intergouvernemental, tout comme ses prédécesseurs. En faveur de davantage d’Europe, pour autant qu’il s’agisse d’une France en grand. Impasse assurée.

Deuxièmement, l’avocat des partis transnationaux que je suis ne digère pas le non-ralliement de LaREM à un parti européen en amont des élections. Je rechigne à donner un chèque en blanc à un éventuel futur groupe au PE dont on ignore quelle sera la cohérence et partant la capacité à promouvoir un programme commun, celui-ci n’étant dévoilé qu’après les élections. Pas très démocratique. J’ajoute ici que je ne comprends pas les raisons d’une liste UDI séparée, si ce n’est que ce parti est, lui, ouvertement affilié à l’ALDE.

Les sociaux-démocrates, selon moi, passent à côté d’un argument clé de campagne : leurs élus seront moins nombreux que ceux de LaREM et du RN, mais ils pèseront davantage de par leur appartenance au deuxième groupe du PE. Or, ils ont préféré une alliance de façade, la principale raison étant sans doute d’atteindre le seuil de 5%, mais de ce fait il est vraisemblable que cette union éclate après les élections, les élus rejoignant des groupes différents. Une candidate a déjà déclaré vouloir siéger avec les écologistes ! Sauf clarification ultérieure, je serai réticent à donner ma voix à PS/Place Publique. Mes regrets pour Sylvie Guillaume.

Ayant considéré les principaux groupes du PE (je fais ici abstraction de ECR qui ne concerne guère les élections en France et qui pourrait bien éclater), il me reste à voir du côté de ceux qui seront capables de donner des coups de pied dans la fourmilière, tant il est nécessaire pour l’UE de se réformer et de mieux répondre aux attentes des citoyens. Le groupe des Verts me paraît bien placé, et j’ai donc de la sympathie pour la liste EELV. Ce parti devrait comme à son habitude faire campagne en affichant son affiliation au PVE, c’est très important pour moi. Malheureusement, le PVE, dont la cohérence est pourtant bien supérieure à celle des autres familles politiques mainstream, réunit encore des partis nationaux d’origine et d’orientation souvent très différentes, et l’action de son groupe au PE s’en ressent.

J’écarte définitivement LFI et son plan B, et bien sûr tous les partis eurosceptiques. Reste la tentative innovante de Printemps Européen, auquel a adhéré Génération.s. Je n’en partage pas tous les choix idéologiques, mais l’engagement fédéraliste ne fait aucun doute et en tant que militant pour des partis transnationaux je souhaite vivement que Yánis Varoufákis réussisse son pari. Il s’agit certes d’une démarche top-down, a priori tout le contraire du fédéralisme, mais DiEM25 a réussi à rassembler des partis nationaux existants, s’assurant ainsi un ancrage territorial. Il y a là du potentiel pour un véritable parti transnational, pour autant que ses composantes militent ultérieurement, à tous les échelons, sous l’étiquette de Printemps Européen. En France, pour ces élections européennes, il y aura une liste commune Génération.s et DemE (Démocratie en Europe, l’antenne électorale de DiEM25). C’est un bon début.

Reste aussi la question du choix entre le vote de soutien à des initiatives conformes à ma vision des partis transnationaux et le vote utile. Printemps Européen réussira-t-il à créer un groupe au PE ? C’est peu probable. Quelle sera alors l’influence des députés élus sur cette liste ? Nul ne le sait. Est-il opportun de donner ma voix au PACE, un parti fédéraliste qui mérite des encouragements, en particulier ses dirigeants avec lesquels j’entretiens des liens personnels ? Et que faire de Volt, la jeunesse fédéraliste en action ?

Pour conclure, vous l’aurez compris, mon choix sera moins déterminé par les positions idéologiques des uns et des autres et les alliances franco-françaises que par la cohérence d’une famille politique à l’échelle européenne, son influence potentielle et sa détermination à faire progresser l’intégration européenne pour finalement instituer une Europe fédérale. De ce point de vue, les paramètres peuvent évoluer jusqu’au dernier moment. Mes amis connaîtront donc ma décision le 26 mai.

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