70 ans de l’ONU : compte-rendu de la conférence du 11 mai 2016 L’Organisation des Nations unies a 70 ans : Bilan et perspectives, Renforcement et démocratisation, actes de la conférence du 11 mai 2016 à Lyon, Institut d’Études Politiques

, par Jean-Luc Prevel

70 ans de l'ONU : compte-rendu de la conférence du 11 mai 2016

L’Organisation des Nations unies a 70 ans : Bilan et perspectives, Renforcement et démocratisation, actes de la conférence du 11 mai 2016 à Lyon, Institut d’Études Politiques.

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Un public d’environ 70 personnes, essentiellement des jeunes, dont des étudiants de Colombie, du Cameroun et de Côte d’Ivoire, a participé à cet événement.

L’ouverture a été faite par Guillaume Bullier, Président des Jeunes Européens Lyon, qui a présenté les différents intervenants et introduit la conférence organisée dans le cadre de la Campagne nationale « L’Europe en mieux » coorganisée par Les Jeunes Européens France, le Mouvement Européen France et l’Union des fédéralistes européens (UEF France).

Jean-Francis Billion, Président de l’UEF Rhône-Alpes, membre du Comité fédéral de l’UEF et du Conseil du World Federalist Movement (WFM), a présenté un historique des mouvements fédéralistes. Même si l’idée fédéraliste est bien antérieure, c’est après la première guerre mondiale qu’apparaissent d’importants mouvements organisés avec l’idée que la souveraineté absolue des États est la cause première des guerres. En 1938, création en Grande-Bretagne de la Federal Union, puis, durant la Résistance va se manifester la revendication forte d’une Europe fédérale. Dès 1941 parait clandestinement le Manifeste de Ventotene écrit par Altiero Spinelli et Ernesto Rossi depuis leur lieu de relégation par le pouvoir fasciste ; en 1943 le Movimento Federalista Europeo est créé à Milan ; dans Lyon occupée, apparaît le Comité français pour la Fédération européenne en juin 1944 avec parmi ses fondateurs Albert Camus alors qu’à Munich plusieurs Résistants de La Rose blanche ont été arrêtés et guillotinés par les nazis… Fin 1946, l’UEF supranationale se crée à Paris ; en 1947, à Montreux, c’est le World Movement for World Federal Government qui voit le jour en présence de fédéralistes du monde entier. À l’heure de la décolonisation des prises de positions fédéralistes s’affirment sur divers continents (Senghor, Nyéréré, N’Krumah, Gandhi, Nehru, etc.). Contre les guerres et l’arme atomique (Abbé Pierre, Einstein…) on assiste à des actions symboliques telles que celle de l’Américain Gary Davis qui rend son passeport et se proclame « Citoyen du monde numéro un » à Paris. Au fil des années les fédéralistes européens vont lutter pour l’élection du Parlement européen au suffrage universel direct (la 1ère sera en juin 1979), une monnaie européenne, le projet de Traité d’Union européenne impulsé par Spinelli et adopté à une large majorité par le Parlement européen (1984) ou une Constitution européenne. Les fédéralistes mondiaux se battent pour une Assemblée constituante et des élections mondiales, des réformes des Nations unies ou soutiennent d’autres processus d’intégration régionale (Amérique latine). C’est après la chute du rideau de fer que l’ensemble des fédéralistes va se retrouver et commencer un long processus de rapprochement. Ils participent depuis le Sommet de la Terre à Rio (1997) aux luttes pour l’environnement et s’engagent pour la création, l’amélioration et l’universalisation de la Cour pénale internationale (années 1990) puis pour la mise en place d’une Assemblée parlementaire des Nations unies (id.). En particulier à Lyon, les JE et l’UEF sont aussi engagés depuis 2013 dans une action toujours actuelle, le New Deal for Europe « pour un plan européen extraordinaire d’investissement pour le développement durable et la création d’emplois », dans le but d’animer la campagne des élections européennes de 2O14 et de recréer un consensus citoyen envers l’intégration européenne et les institutions de l’Union européenne, préalable à toute action constituante du Parlement européen.

Pierre-Yves Maurice, Viceprésident de l’UEF RhôneAlpes, ancien fonctionnaire des Nations unies, fait un bilan de l’ONU à l’occasion de son 70e anniversaire. En 1945, il s’agissait de régler les problèmes de sécurité internationale et d’assurer la paix, puis le développement économique et la défense de l’environnement.
Côté positif, c’est la diffusion d’une véritable culture onusienne, le droit à l’égalité, le droit d’ingérence, la création de normes morales universelles, la nondiscrimination, la régulation du travail. Ce sont aussi de nombreuses actions sur le terrain par une myriade d’institutions.

Les faiblesses de l’ONU sont sa taille, sa dispersion, son absence d’autonomie financière, mais aussi l’obstruction de certains pays et sa marginalisation par l’apparition des G7, puis G8… G20. On voit croitre ses relations avec le secteur privé mais son avenir est aujourd’hui menacé.

L’ONU doit se démocratiser. Le cadre institutionnel est à revoir avec une Assemblée générale où tous les États ont le même poids et son Conseil de sécurité où les cinq États membres permanents nommés conservent un droit de véto paralysant. L’ONU a élaboré de nombreu¬ses conventions mais connait un déficit de moyens pour les appliquer. Elle doit maintenant se recadrer sur l’intérêt général mondial. Elle doit être plus forte et plus cohérente dans les domaines de la redistribution et de l’immigration. Elle doit mieux gérer les organismes financiers (Banque mondiale, FMI) et répondre au défi de la survie de la planète.

Le Professeur Sylvain Schirmann, Professeur des Universités, Directeur honoraire de SciencesPo Strasbourg, évoque la mise en place de la Société des Nations (SDN) à travers le Covenant de 1920. Au lendemain de la première guerre mondiale, son objectif était la pacification du monde. À côté d’un schéma, Conseil, Assemblée, Secrétariat, elle va se doter de nombreuses organisations techniques dans les domaines économique, social, de l’éducation, des arts, etc. Elle va aussi aborder les questions du travail et des réfugiés, avec la mise en place du passeport Nansen en 1924 pouvant remplacer tout passeport national et permettant aux réfugiés et migrants de se déplacer librement dans le monde entier aussi bien qu’avec n’importe quel passeport national. De nombreux réfugiés ou migrants ont pu à l’époque en bénéficier, en particulier en France la diaspora arménienne et nous pouvons voir aujourd’hui combien la situation a pu se dégrader depuis lors… La SDN, plombée en particulier par la nonparticipation des ÉtatsUnis, et la participation tardive de l’Union soviétique, verra par ailleurs le retrait des pays d’Amérique latine qui la considèrent comme un club trop européen et du Japon ; elle ne disposera jamais de forces de maintien de la paix. Elle va enfin « créer le fonctionnaire international ».

La SDN est donc la première étape vers une certaine internationalisation des relations entre États. Pendant la crise de 1929, elle va par ailleurs jouer un rôle européen important en liant et en délimitant les crises nationales (agricole, industrielle, des finances publiques, etc.). Longtemps avant les communautés européennes, apparues dans le second aprèsguerre, elle va créer des critères de convergence et garantir les emprunts de pays très endettés tels que l’Autriche, la Hongrie, etc., en les mettant sous tutelle…

Il est clair aujourd’hui que la SDN, même si elle n’aura pu éviter un nouveau conflit mondial, ne peut toutefois pas être considérée comme un simple échec ; elle aura été plus qu’un simple brouillon des Nations unies dont l’architecture sera en 1945 à la Conférence de San Francisco largement inspirée de la sienne propre ; elle en a été en fait le précurseur.

Pierre-Yves Maurice, dans une deuxième intervention programmée, évoque la mise en place à la fin du XIXe siècle de l’Union interparlementaire (UPI), composée de parlementaires de nombreux pays, qui ne pourra pas s’intégrer à la SDN ni à l’ONU. L’UPI réunit des parlementaires de 160 pays membres et de 10 pays associés. Elle n’a pas de pouvoir normatif, seulement un rôle d’arbitrage international.

Par ailleurs, depuis 2007 se développe une campagne mondiale pour une Assemblée parlementaire des Nations unies (APNU) sous la responsabilité du Comité pour des Nations unies démocratiques (KDUN) dont le siège est à Francfort. Le principal animateur et l’âme en est l’Allemand Andreas Bummel qui siège par ailleurs depuis quelques années au Conseil du World Federalist Movement. Cette Assemblée pourrait être mise en place sans modifier la Charte de l’ONU, comme organe consultatif auprès de l’Assemblée générale, et être composée, dans un premier temps, de représentants des parlements nationaux. Cette campagne a déjà obtenu le soutien de nombreuses personnalités et de divers parlements (européen, Union africaine, Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, canadien, etc.) et de plus de 1200 parlementaires ou parlementaires honoraires et tout récemment d’une Commission des Nations unies pour la réforme de l’ONU.

Après les trois interventions un temps de questions réponses particulièrement riche s’est mis en place. Une publication plus formelle sera publiée lorsque l’ensemble des documents préparés par les intervenants nous seront parvenus à la fin du mois.

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